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de l’égalité, entre les délinquans en fait d’émigration à l’étranger et ceux qui quittaient les campagnes pour se réfugier dans les villes ; car, à cette époque, les travaux de culture étaient si durement imposés, que cela équivalait presque à la peine de mort établie contre ceux qui tenteraient de s’expatrier.

« Pendant que les hauts fonctionnaires civils et mllitaires se procuraient ainsi d’une manière rapide, une amélioration à leur position, le peuple, surtout celui des campagnes, était tenu sous un régime de fer. Le travail forcé était en pleine vigueur, et le vol le plus léger était le plus souvent puni de mort, selon le caprice des chefs militaires. Le condamné était quelquefois exterminé sous la verge et le bâton, par des soldats pris indistinctement dans les corps ; il n’y avait pas de bourreau, et le soldat, par accident, en faisait l’office, comme s’il eût rempli un service militaire[1]. »

Il n’y a rien que de vrai dans ce triste tableau ; mais le malheureux soldat lui-même était aussi exposé que le cultivateur des champs, que l’habitant des villes, à ces traitemens barbares. Les uns et les autres pouvaient donc apprécier, dans le même mois du couronnement de l’empereur, ce qu’ils avaient gagné déjà au nouveau régime qui avait suivi la déclaration de l’indépendance nationale.

« Déjà, Dessalines avait réuni à Marchand des sommes importantes provenant tant des contributions qu’il ce avait établies sur les blancs avant leur massacre et des droits de douane, que du produit du quart de subvention à titre d’impôt territorial… Sous Toussaint Loueverture, les caisses de l’Etat étaient celles du gouverneur ; sous Dessalines, elles étaient devenues celles de

  1. Hist. d’Haïti, t. 3, p. 182.