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l’indépendance américaine ; et Gérin en avait acheté aussi dans le port d’Aquin. Tous les généraux, du reste, avaient été autorisés à se procurer ces articles de première nécessité, dans la situation où se trouvait le pays.

Ainsi, les États-Unis furent la seconde puissance étrangère qui entra en relations internationales avec Haïti. Pour eux, comme pour la Grande-Bretagne, le fait de l’indépendance y suffisait, leurs intérêts commerciaux n’ayant pas à discuter le droit. Peu importe la forme de ces relations, qu’elles aient ou non revêtu le caractère diplomatique : c’est aussi le fait qu’il faut examiner dans ces ouvertures. De nos jours encore, qu’importe à Haïti le dédain des Anglo-Américains qui s’étayent de leurs absurdes préjugés de couleur, pour ne pas reconnaître, suivant les formes admises dans le droit des gens, son existence politique datant déjà d’un demi-siècle ? Peuvent-ils nier le fait qu’ils ont reconnu dès 1804, guidés par cette passion pour le lucre dont ils sont possédés ?

À cette occasion, nous nous ressouvenons d’une idée tout-à-fait originale, exprimée par Dessalines. On vint lui rapporter que quelqu’un avait dit, qu’il était à craindre que les nations étrangères ne voulussent entretenir aucune relation avec Haïti, à cause des vengeances exercées sur les Français. Loin de se fàcher de cette opinion qu’il pouvait considérer comme la censure de sa conduite, il répondit : « Un tel ne connaît pas les blancs. Pendez un blanc au-dessus d’un plateau de la balance de la douane, et mettez un sac de café dans l’autre plateau : les autres blancs viendront acheter ce sac de café, sans porter aucune attention au cadavre de leur semblable. »

Ainsi, il s’inquiétait peu de la reconnaissance de l’in-