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gouverner dignement la nation, un titre auguste et sacré qui concentre en lui les forces de l’État, qui en impose au dehors, et qui soit au dedans le gage de la tranquillité ;

Considérant que le titre de Gouverneur général, décerné au citoyen Jean-Jacques Dessalines, ne remplit pas d’une manière satisfaisante le vœu général, puisqu’il suppose un pouvoir secondaire, dépendant d’une autorité étrangère dont nous avons à jamais secoué le joug ;

Sans avoir plus longtemps égard au refus constant et obstiné du citoyen Jean-Jacques Dessalines, d’accepter une puissance que le peuple et l’armée lui avaient déléguée dès l’époque où notre indépendance a été proclamée, puisque ce refus contrarie les intérêts, la volonté et le bonheur du pays ;

Déférons au citoyen Jean-Jacques Dessalines le titre d’Empereur d’Haïti, et le droit de choisir et de nommer son successeur.

Désirons que cette expression libre de nos cœurs et déjà provoquée par le peuple, soit offerte à sa sanction, sous le plus bref délai, et reçoive sa prompte et entière exécution par un décret du sénat qui sera extraordinairement convoqué à cet effet.

Cet acte n’aurait dû avoir que le seul considérant relatif au titre de gouverneur général, parce que c’était là le seul motif raisonnable à donner pour justifier celui d’empereur.

Mais les secrétaires de Dessalines, J. Chanlatte et B. Tonnerre surtout, qui voulaient rester omnipotens sur son esprit, malheureusement peu éclairé, en glissant les deux autres considérans sur la nécessité de ne point admettre de partage dans son autorité suprême, de la concentrer en ses mains seules, avaient pour but d’écarter de ses conseils, pour l’administration du pays, les généraux de l’armée considérés, dès janvier, comme des conseillers d’État. Ils insinuaient ainsi, dans l’esprit de Dessalines, une défiance contre toute prétention des généraux à cet égard ; et, d’un autre côté, ils créaient un juste