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Nous avons relaté toutes les circonstances relatives au séjour de T. Louverture sur ses propriétés jusqu’à ces deux lettres, d’après son mémoire adressé au Premier Consul et ceux publiés par son fils Isaac. Si l’on s’y rapporte uniquement, on reconnaît une insigne perfidie de la part de Leclerc, après avoir promis à T. Louverture l’oubli du passé et la protection du gouvernement. Mais, avant de porter notre jugement à cet égard, avant de dire comment T. Louverture tomba dans le piège qui lui fut tendu, nous devons à nous-même et à nos lecteurs, de mentionner d’autres circonstances, d’autres documens produits par Leclerc, pour expliquer les motifs qu’il a eus d’ordonner l’arrestation et la déportation de T. Louverture. Nous les jugerons également.

Suivant les mémoires de Pamphile de Lacroix, qui a été un écrivain presque officiel de l’expédition de Saint-Domingue, — des subalternes soumis immédiatement à T. Louverture tenaient des propos indiscrets journellement, des cultivateurs répétaient que leur soumission n’était qu’une suspension d’armes jusqu’au mois d’août, époque des pluies et des fortes chaleurs qui les produisent, et du développement complet de la fièvre jaune sur toute armée européenne, occupant la colonie.

L’expérience du passé l’avait prouvé, effectivement, tant sur les troupes françaises envoyées dans les premières années de la révolution, que sur celles de la Grande-Bretagne. En citant la lettre de T. Louverture à Dessalines, écrite des Gonaïves le 8 février, nous avons relevé cette observation à propos de cette phrase : « N’oubliez pas qu’en attendant la saison des pluies qui doit nous débarrasser de nos ennemis…  » par la fièvre jaune. Si cette idée a été émise alors par l’ex-gouverneur,