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D’Héricourt, dans la Plaine-du-Nord, en compagnie du général Fressinet, et le lendemain il retourna à la Marmelade. Le 8 mai, il reçut l’ordre de Leclerc d’envoyer au Cap sa garde à pied et à cheval.

Une scène attendrissante eut lieu à cette occasion : passant cette garde en revue pour la dernière fois, il exprima en termes touchans aux officiers et aux soldats qui avaient si bien défendu sa cause, la reconnaissance dont il était pénétré pour leur dévouement ; et en leur rappelant qu’ils avaient toujours eu une discipline exemplaire, un respect parfait pour son gouvernement, il leur recommanda d’avoir la même conduite à l’égard de l’autorité nouvelle à laquelle ils allaient obéir désormais. Magny, au cœur si noble, Morisset et Monpoint, d’un attachement si constant, versèrent des larmes comme tous leurs officiers inférieurs et leurs soldats. Cette expression de leurs regrets émut profondément T. Louverture.

Cette scène militaire n’est-elle pas comparable à celle dont le château de Fontainebleau fut le théâtre douze années plus tard ? Entre les deux Héros qui figurèrent dans l’une et l’autre, quelle différence y eut-il quant à la circonstance que nous relatons ? Que de rapprochemens d’ailleurs n’a-t-il pas existé entre ces deux destinées supérieures, relativement aux lieux qu’elles remplirent de leur renommée, qu’elles gouvernèrent, et encore par certains actes d’administration, par l’adversité de leur fortune !…

Le capitaine-général avait envoyé en même temps à T. Louverture, un ordre pour le général Dessalines. Il s’agissait de le lui faire agréer, de le porter à y obéir, pour réunir ses troupes et les conduire à Saint-Marc. Ce général ne s’était pas prononcé, et Leclerc avait douté, d’après