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guerre. Pareilles dépêches furent adressées aux divers gouverneurs des Antilles.

Pour mieux déterminer l’amiral anglais, Villaret-Joyeuse lui disait : — « que l’armée française venait protéger les principes conservateurs sur lesquels reposait l’intérêt commun de toutes les puissances européennes dans leurs établissemens des Antilles[1]. »

C’était un langage digne du législateur de 1797, siégeant au conseil des Cinq-Cents. Mais lisons la réponse de l’amiral anglais :

Monsieur,

J’ai reçu la lettre que Votre Excellence m’a fait l’honneur de m’écrire, pour me communiquer l’arrivée au Cap des forces françaises qui sont sous son commandement, et je suis flatté de la confiance dont V. E. m’honore, en me faisant connaître l’état de ces forces et leur destination. Ces informations sont parfaitement conformes à celles que j’ai reçues des ministres de S M. et qui me transmettent en même temps les ordres du Roi, mon maître, pour traiter la nation française avec tous les égards possibles.

Mais, quant à ce qui concerne les secours en vivres que V. E. paraît craindre d’être dans le cas de réclamer, je vois avec un véritable regret que notre situation présente, causée par l’arrivée inattendue de très-grandes forces de mer et de terre, me met dans l’impossibilité de vous présenter même aucun espoir d’assistance. Nos propres ressources sont tellement bornées, que j’ai été obligé de détacher des frégates sur différens points pour chercher les moyens de nous mettre à l’abri d’une détresse entière, et j’ai dû, ainsi que V. E., chercher à tirer ces secours du continent américain en attendant qu’il puisse nous en arriver d’Europe.

C’est avec un sentiment pénible que j’ai appris la réception hostile faite à V. E., et cette violation directe de tous les devoirs des colonies envers leur métropole.

  1. Thibaudeau, histoire du consulat et de l’empire. Cet auteur fait la réflexion suivante, à propos de cette phrase : C’était annoncer le retour de l’esclavage. Il dit ainsi, par opposition à la proclamation de Leclerc, qui promettait le maintien de la liberté… aux habitans.