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Louverture. Il ne se bornait pas à permettre ou à défendre en thèse générale ; il fallait encore toujours recourir à son autorité, pour jouir de toute permission accordée par ses actes. Pour mieux apprécier ce despotisme, aidons-nous de quelques opinions émises par M. Madiou, avec qui nous nous trouvons souvent en opposition d’appréciations par rapport à T. Louverture. En caractérisant son gouvernement, cet auteur dit :

« Depuis la chute de Rigaud et la réunion de l’ancienne possession espagnole à la colonie française, l’autorité de Toussaint était devenue sans bornes sur toute l’étendue de l’île Toussaint paraissait tenir entre ses mains les destinées de la colonie… Il était parvenu à remplir, les caisses de la trésorerie générale, qui étaient les siennes, et à établir sa puissance sur les têtes les plus fières qu’il courbait ou qu’il tranchait. Aucun obstacle n’arrêtait plus sa marche : il avait anéanti, après l’embarquement de Rigaud, ceux des noirs et des hommes de couleur qui auraient pu s’indigner contre ses faits cruels et les contrarier… Dans les savanes, dans les gorges des montagnes, des cultivateurs noirs montraient en frémissant aux voyageurs de vastes espaces couverts d’ossemens humains. Jusqu’alors, Toussaint se montrait sourd aux gémissemens qui arrivaient jusqu’à lui. Entouré de prêtres scélérats, de colons perfides, qui l’excitaient sans cesse à continuer le massacre des hommes de couleur, il se confessait après chaque crime et s’approchait de la sainte table. Nous avons vu qu’il y avait dans son armée un grand nombre d’hommes de couleur, particulièrement du Nord et de l’Artibonite, parmi lesquels on remarquait le général Clervaux, les commandans Nérette, Larose, Gabart, Ferbos, officiers de mérite et de courage, qui avaient servi