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de sa Bastille du Morne-Blanc, aux Gonaïves ; il en fait massacrer d’autres.

Pamphile de Lacroix, et après lui, M. Madiou, place la sortie virulente du général en chef à une date postérieure, après que les premières hostilités avaient commencé. Mais Kerverseau, qui était dans la colonie, qui a dû être mieux renseigné sur les faits, qui a pu l’être même par Roume, Kerverseau dit au ministre de la marine :

« Trois jours après le départ de Rigaud, une diatribe dégoûtante d’injures et pleine d’imputations atroces contre tous les hommes de couleur, prononcée en chaire par Toussaint, au son du tambour, dans l’église du Port-Républicain, est suivie dans cette ville de nombreuses arrestations ; et, dans les mornes de Jacmel, du massacre de près de quarante propriétaires, tous hommes de couleur ; un cri de mort retentit dans toute la colonie contre cette caste ; les uns s’enfuient dans le Sud, les autres dans la partie espagnole. Cependant, ce premier mouvement s’arrête tout-à-coup ; le carnage fut suspendu, mais l’appel avait sonné[1]. »

Si telle fut la conduite de T. Louverture au moment où, parti du Port-au-Prince, Rigaud retirait ses troupes du Grand-Goave et du Petit-Goave, nous le demandons aux lecteurs impartiaux, qui ne se font point un système préconçu pour juger des actions des hommes, qui ne recherchent que la vérité historique dans les faits imputables à tous ; nous leur demandons :

Entre T. Louverture et Rigaud, lequel montra le plus

  1. Bientôt, nous verrons un acte de Roume qui confirme l’assertion de Kerverseau, quant à la diatribe de T. Louverture, aussitôt après le départ de Rigaud. Voyez au chapitre 3.