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près des documens authentiques que nous possédons. Mais nous sentons la nécessité de relever les inexactitudes ou les incohérences qui se font remarquer dans Pamphile de Lacroix qui, écrivant sous la forme de Mémoires, ne s’est pas toujours astreint à suivre l’ordre chronologique des faits. Cette nécessité est d’autant plus urgente, selon nous, que notre compatriote, M. Madiou, dans son Histoire d’Haïti, a trop souvent suivi cet auteur dans le classement des événemens. Or, ici, l’ordre chronologique doit nous amener naturellement à porter un jugement impartial sur la conduite respective de T. Louverture et de Rigaud, afin de considérer et de décider qui, des deux, a eu le plus grand tort dans la guerre fratricide qu’ils se firent tous deux, au nom des intérêts de la France ; qui, des deux, a mieux entendu les véritables intérêts de la race noire à Saint-Domingue.

On a vu Rigaud, se basant sur la décision d’Hédouville, persister à vouloir obtenir l’intégrité du territoire du Sud dans son commandement, en vertu de la loi de brumaire an vi ; mais on l’a vu aussi céder à la fin à la nouvelle décision prise par Roume qui, refusant sa démission, lui dit qu’il ne s’agissait pas de ce qu’avait fait son prédécesseur ; et Rigaud consentit à remettre à Laplume le Grand-Goave et le Petit-Goave. Eh bien ! c’est au moment où il part pour exécuter ce consentement à l’amoindrissement de son commandement, c’est peu de jours après avoir exécuté sa promesse, après avoir montré de la modération ; c’est alors que T. Louverture réunit la population à l’église du Port-au-Prince et fulmine contre toute la classe des hommes de couleur. Se borne-t-il à ces paroles injustes, à ces menaces foudroyantes ? Non ! Il fait opérer immédiatement des arrestations au Port-au-Prince, il envoie les personnes arrêtées dans les cachots