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vous ne me la laisserez pas désirer plus longtemps, en me répondant d’une manière satisfaisante à ma réclamation.

Des raisons d’État ont déterminé l’agent du gouvernement à m’ordonner, le 7 floréal an 8 (27 avril) de prendre, au nom de la République, possession de la partie de cette île cédée à la France par Sa Majesté Catholique, d’après le traité conclu à Bâle entre les deux nations. En conséquence, je vous préviens que j’ai chargé le général Moïse, commandant en chef la division du Nord, de cette importante expédition ; et, d’après l’outrage qu’a essuyé le gouvernement en la personne du général Agé pour la même mission, j’ai dû faire accompagner le général Moïse d’une force armée suffisante, pour l’exécution du traité et pour la protection de toute cette partie de l’île, contre les entreprises des ennemis de la République.

Je désire de tout mon cœur que la conduite franche et loyale des habitans et la vôtre, Monseigneur, réalise mes espérances et me mette à même de contremander la plus grande partie des troupes que l’expérience a nécessité de mettre en mouvement, pour assurer la pleine et entière exécution des ordres du gouvernement.

J’espère également, Monseigneur, que vous voudrez bien ne point laisser ignorer aux Espagnols qui resteront sous les lois françaises, que leurs personnes et leurs propriétés seront respectées, et qu’il ne sera rien innové aux usages religieux qu’ils professent. Recevez-en, Monseigneur, je vous prie, ma parole inviolable de militaire. Soyez en même temps persuadé que si j’insiste sur la réparation que je réclame de Votre Excellence, à l’occasion de l’insulte faite au gouvernement en la personne du général Agé, c’est parce que j’ai uniquement à cœur, en faisant respecter le nom français, d’entretenir les liaisons d’amitié qui existent entre les deux métropoles.

Que Dieu vous prenne, Monseigneur, en sa sainte garde.

J’ai l’honneur d’être, avec tous les égards dus à votre mérite et à votre dignité, etc.

Toussaint Louverture.

Ce n’était plus le même personnage de 1794, se plaignant à Don Garcia contre Biassou, lui demandant sa protection : en 1800, il s’agissait d’une réparation à obtenir du gouverneur espagnol lui-même. Que le lecteur