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mingue étaient parfaitement satisfaits des résultats obtenus par la guerre civile du Sud. S’ils durent se réjouir du présent qui était tout en faveur de leurs privilèges, ils ne comptaient pas moins sur l’avenir, alors que la France était vigoureusement dirigée par un gouvernement qui en restaurait beaucoup dans son sein. Envoyant T. Louverture lancé à pleines voiles sur cette mer orageuse, ils espérèrent, avec raison, que son système d’administration faciliterait tôt ou tard l’exécution de la réaction méditée depuis plusieurs années dans la métropole, et qu’il ne pourrait échapper au naufrage où il devait nécessairement aboutir. En attendant ce moment, les colons jugèrent avec non moins de raison, qu’il fallait d’avance couvrir de fleurs cette victime pour en rendre le sacrifice plus délicieux.

Dans ce dessein, dès qu’ils eurent appris au Cap, rentrée du général en chef aux Caves et la fuite de Rigaud, ils célébrèrent ces événemens par une fête splendide, à laquelle assista le général Moïse qui ne partageait pas leurs sentimens et qui devait périr victime des siens. Corneille Brelle, prêtre capucin depuis longtemps curé au Cap, fit les frais de la fête au Champ-de-Mars, par un discours prononcé sur l’autel de la patrie, contenant les éloges les plus pompeux de T. Louverture, qu’il compara au Premier Consul de la République française. Il chanta ensuite une messe solennelle, un Te Deum, chant favori du général en chef.

Le 29 août, l’administration municipale du Cap, toujours en premier au service de ce chef dans les grandes occasions, lui fit une adresse de félicitations pour ses succès glorieux, sa générosité, son humanité, en parlant de la fuite de Rigaud, brigand fameux par ses crimes. Cet acte se terminait ainsi : « Que les esprits inquiets et re-