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Ce fut un coup de massue sur la tête de Bauvais : son esprit se troubla, quand il reçut cette lettre imaginée par le machiavélisme de Roume et de T. Louverture. Le blanc se réunit au noir, pour accabler le pauvre mulâtre qui avait cru pouvoir garder la neutralité dans une question où il était nécessairement intéressé. Dès le mois de juin, Bauvais avait écrit à Roume pour lui demander sa démission. Le 2 juillet, il lui écrivit de nouveau en sollicitant l’autorisation d’aller au Cap auprès de lui, ou à Santo-Domingo, où était Kerverseau. Il déclara à Roume qu’il avait eu la pensée de quitter son poste, et de partir par un bâtiment de commerce qui était à Jacmel. Roume refusa d’accéder à toutes ces demandes, d’accord avec le général en chef.

Mais, occupé à éteindre l’insurrection du Nord, T. Louverture n’envoya pas à Bauvais cette lettre foudroyante, aussitôt qu’elle fut écrite : il attendit sa pacification sanglante. Aussi bien, n’étant écrite que le 9 août, cette réponse de Roume avait une apparence spécieuse de vérité à l’égard de Bauvais : spécieuse, en ce que l’agent, si digne du Directoire exécutif, ne tenait aucun compte de l’attaque des partisans de T. Louverture à Saltrou et à Marigot, de la prise de ces bourgs par eux, ni de l’insurrection de Lafortune et Conflans, à l’ouest de Jacmel. Et voici ce qui semblait légitimer l’accusation de Roume contre Bauvais.

Le 5 août, après bien des manœuvres de la part des chefs placés à Tavet, Birot s’était vu contraint d’attaquer la 11e demi-brigade. Il fut blessé dans ce combat et y perdit 150 légionnaires ; mais il chassa la 11e de Tavet, malgré la force supérieure de ce corps, sa défense opiniâtre et la position avantageuse qu’il occupait. À cause