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sa lettre se terminait d’une manière blessante pour le général en chef ; en l’engageant à prouver sa fidélité à la France, par l’expulsion des émigrés, à se montrer l’homme du gouvernement français, c’était lui dire qu’il semblait trop favorable au projet dont Hédouville l’avait accusé. Mais, d’après les lois françaises, les émigrés devaient-ils être admis à Saint-Domingue ? Mais, T. Louverture n’avait-il pas blessé Rigaud, en lui imputant des desseins contraires à la liberté des noirs ? Avait-il seul le privilège des imputations et des injures ? Les siennes étaient injustes, tandis que Rigaud avait raison de lui reprocher ses faveurs pour les émigrés.

Insistant encore sur ses accusations, il reçut de Rigaud une autre réplique, le 30 novembre : « En me laissant séduire par Hédouville, dit Rigaud, j’eusse fait preuve de perfidie et de stupidité. Je déclare hautement que le général Hédouville ne m’a parlé et écrit que pour la prospérité de Saint-Domingue, que pour l’établissement de l’ordre constitutionnel et pour l’affermissement de la liberté et de l’égalité. Je lui ai vainement demandé ma démission ; je la demanderai au Directoire et à l’agent Roume. »


On a vu, dans le 3e livre, que Rigaud avait manifesté à Roume, par sa lettre du 28 avril 1798, son désir d’aller en France remplir son mandat de député au corps législatif. Bientôt on le verra solliciter avec insistance sa démission de commandant du département du Sud, de Roume qui la lui refusera encore, tant les agens de la France et son gouvernement avaient besoin de faire éclater la guerre entre les défenseurs de cette colonie, qu’ils avaient arrachée des mains des Anglais et des colons. Et puis, Ker-