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gratuite, qu’on peut admettre qu’il avait le dessein ultérieur d’une indépendance absolue de la colonie au profit unique de la race noire ; mais le fait qui a existé, conséquent à tous les antécédens de cet homme, s’oppose à ce qu’on lui prête des rues aussi généreuses.

Relisez donc cette foudroyante accusation portée contre lui par Dessalines !

« Généraux, officiers, soldats ; peu semblable à celui qui m’a précédé, à l’ex-général T. Louverture, j’ai été fidèle à la promesse que je vous ai faite en prenant les armes contre la tyrannie… Jamais aucun colon [1]… »

Si Moïse, qui a eu à se plaindre d’Hédouville, a jugé que sa décision à l’égard du commandement de Rigaud pouvait être respectée et maintenue, jusqu’à une décision contraire et formelle du Directoire exécutif, c’est que Moïse y voyait une sorte de justice par rapport aux grands services rendus par Rigaud dans la cause de la liberté générale ; c’est qu’il ne voyait pas en lui un ennemi des noirs, comme son oncle le disait. Si nous n’avions pas d’autres raisons pour condamner la conduite de T. Louverture, nous nous arrêterions aux sages opinions émises par Moïse : elles sont la condamnation la plus frappante de cette conduite, et d’autant mieux, que Paul Louverture, bien connu par sa modération, les partageait.


Le général en chef était encore à Léogane, dans les premiers jours de juillet, quand les troupes du Nord, sous les ordres de Moïse, y arrivèrent[2]. Il décida que Moïse

  1. Proclamation du 28 avril 1804.
  2. Une lettre de Roume à Kerverseau dit que Toussaint Louverture était à Léogane le 24 messidor (12 juillet).