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toujours prêts à éclater, et à peine interrompus par quelques momens de calme. Les choses en étaient venues au point que Raymond ne pouvait, sans pâlir, recevoir un message de Toussaint, et personne ne doutait que bientôt on ne lui intimât l’ordre d’aller en France rejoindre son collègue… Toussaint ne voulait plus de supérieur, et Raymond ne pouvait échapper à la honte d’un embarquement, si l’arrivée de son successeur n’était venue donner une nouvelle direction aux esprits et une nouvelle face aux affaires. »

Nous verrons ce successeur lui-même forcé aussi à s’embarquer ; mais, outre que nous avons autre chose à dire avant cela, convenons que J. Raymond méritait bien les tourmens qu’il endurait ! Lorsqu’un homme, dans une position politique, méconnaît les devoirs essentiels que lui dicte l’honneur, il encourt non-seulement de justes reproches, mais il se rend digue du mépris de celui dont il a voulu servir les passions ou l’ambition.


Si T. Louverture, dans le Nord, s’attacha à fortifier son autorité par des mesures d’organisation, Rigaud, dans le Sud, en prenait aussi, principalement pour parvenir à l’expulsion des Anglais de la Grande-Anse. Dès la fin du mois d’avril, il avait organisé quatre régimens ou demi-brigades, formées des troupes de la belle légion de l’Égalité du Sud, que Desfourneaux trouvait trop nombreuse : des recrutemens complétèrent ces corps dont le commandement fut confié, le 1er à Dartiguenave, le 2e à Faubert, le 3e à Renaud Desruisseaux, et le 4e à Doyon aîné. Quant aux mesures administratives et financières, Rigaud n’en avait pas à prendre, le Sud ayant déjà son organisation en règle sous ce rapport.