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de la France qui exciterait à son tour, d’après ce précédent, ce même Rigaud contre Toussaint Louverture dont il lui foisait l’éloge. Là nous paraît être le plus grand danger pour cette race noire que Polvérel, comme Sonthonax, veut voir affranchie à jamais du joug de l’esclavage. Car ce système de divisions semées entre ces enfans d’un même pays, de la même race, serviteurs dévoués de cette mère-patrie qui les a réhabilités dans leurs droits naturels, ce système une fois admis, est devenu la base de sa politique et de celle de ses agens à Saint-Domingue. Nous l’aurions conçu de la part de Sonthonax, agissant presque toujours par expédiens, subissant l’influence déplorable de ses passions, de son ressentiment, de ses rancunes ; de Sonthonax qui, en 1796, est revenu dans la colonie le mettre en pratique ; mais nous n’avons pu le comprendre de la part de Polvérel. Ce dernier a commis, à notre avis, une de ces fautes qui ne se réparent jamais. Il a tracé une funeste voie à Hédouville qui ne l’a que trop suivie, et des flots de sang ont inondé Saint-Domingue.

Au reste devons-nous nous en plaindre ? Lorsque les gouveruemens oublient leurs devoirs envers les peuples, et qu’ils pratiquent l’affreux système de Machiavel, ils peuvent réussir pendant un certain temps. Mais toujours il arrive un moment où les peuples s’éclairent et brisent leur joug abhorré. Haïti n’a-t-elle pas remplacé Saint-Domingue ?…


Quels que soient les reproches que nous nous croyons en droit d’adresser à la mémoire de Polvérel et de Sonthonax, nous devons les féliciter d’être sortis victorieux de l’accusation injustement portée contre eux par les colons. N’oublions pas que ces derniers ne les ont tant détes-