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des blancs, et leur fît tirer à minuit trois coups de fusil sur celle des noirs. Ceux-ci qui étaient prévenus et presque tous sous les armes, parce qu’on leur avait insinué qu’on voulait les leur ôter, firent feu sur la caserne des blancs, dont ils se croyaient attaqués. Les soldats d’Artois tous endormis, réveillés par cette attaque imprévue, sautent sur leurs armes : les uns, quoique à demi nus, ripostent au feu avec vigueur ; les autres enfoncent les panneaux (très-solidement construits, car nous avons vu ces casernes de bout), et se sauvent dans la ville, où ils trouvent leur colonel qui venait à leur secours. » Précédemment, Malenfant, dans son livre, avait dit « que Montbrun ne fît entrer dans les casernes qu’une compagnie de mulâtres et de nègres à lui dévoués, et qu’il marcha à leur tête contre la caserne des blancs, et canonna les soldats d’Artois qui y étaient tranquillement couchés et endormis. » Contrairement au précédent narrateur, il se borne à dire : que le gouvernement fut cerné, et que, sans le courage et l’intrépidité de Desfourneaux, le commissaire aurait péri. Ce général vint le délivrer, à la tête de quelques soldats d’Artois qu’il rassembla des postes, de la caserne et dans les rues où ils se sauvaient en désordre, pour échapper à l’artillerie de Montbrun. »

Nous ne nions pas le courage, la bravoure et l’intrépidité de Desfourneaux ; nous avons déjà établi qu’il possédait ces vertus militaires. Mais à travers ces deux narrations décousues, faites, la première, une année après l’événement, la seconde, en 1814, vingt années après, nous découvrons la vérité historique du fait : c’est que les deux corps de troupes, le régiment d’Artois et la légion de l’Ouest, prévenus l’un contre l’autre, lo-