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lui opposait le plus grand obstacle dans la guerre de l’indépendance.

Car, il faut le dire une fois pour toutes, si à ces époques reculées, comme aujourd’hui encore, le mulâtre et le noir de ce pays ont dû et doivent toujours accepter avec fierté leur origine africaine, ne pas en rougir devant les préjugés coloniaux, ils ont dû et doivent encore réprimer vigoureusement toutes ces idées, toutes ces pratiques nées de la barbarie de l’Afrique et inconciliables avec la civilisation du peuple.

Nous concluons donc qu’Halaou sera tombé victime de sa grossière ignorance, du danger qu’elle présentait à nos devanciers pour la cause de ses frères eux-mêmes. Nous qualifions ce fait de crime, parce que, à notre avis, quelle que soit la situation, quels que soient les raisonnemens de la politique, lorsqu’un homme périt de mort violente, c’en est un. La morale ne saurait approuver un seul fait de cette nature, sans être contrainte d’approuver également toutes les énormités que la politique se permet. Nous savons bien que celle-ci réussit très-souvent dans ses procédés arbitraires, qu’elle éloigne un danger présent, quelquefois avec les meilleures intentions ; mais la légitimité du but n’autorise jamais la violation des lois de l’humanité. Cette violation entraîne souvent, ou des remords, ou des regrets, et toujours des reproches de la part de la postérité.

Si cette explication que nous avons essayé de donner au meurtre d’Halaou nous paraît fondée sur des probabilités, pour le vulgaire de cette époque, il n’a été que le résultat de l’intention supposée à Sonthonax contre Bauvais : de là la tradition populaire de notre pays. L’intention que nous supposons nous-même, peut-être à tort, à Pinchi-