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Guyambois avec quelques autres de ses coaccusés, pour gagner à la république plusieurs partis de nègres de la Croix-des-Bouquets et d’autres communes voisines, qui vivaient dans une sorte d’indépendance. Il fit recruter parmi ces nègres, ou parmi ceux qui avaient été mis en liberté par l’affranchissement général, pour compléter le bataillon du 48e régiment ci-devant d’Artois, qui était toujours au Port-Républicain… »

Notons ici que Garran se trompe, en disant que ce fut parmi les nègres affranchis que se fît le recrutement du 48e : ce recrutement eut lieu parmi les blancs de l’ancienne troupe de Praloto.

Or, en ce temps-là, Bauvais était à la Croix-des-Bouquets avec une partie de la légion de l’Ouest. Les noirs indisciplinés de la plaine du Cul-de-Sac avaient à leur tête l’un d’eux nommé Halaou, qui suivaient toutes les pratiques des sortilèges africains. Les superstitions barbares de son pays natal faisaient sa puissance sur les bandes qu’il dirigeait. Un coq blanc qu’il portait constamment, semblait à la foule lui transmettre les inspirations célestes. Des sorciers secondaires étaient attachés à ses pas et l’aidaient à faire mouvoir ces masses privées de lumières. Son physique même contribuait à sa toute-puissance sur ces imaginations toujours dominées par la crainte : il était d’une taille gigantesque, telle qu’on en trouve chez certaines peuplades de l’Afrique.

Gagné par Guyambois, Halaou voulut connaître ce Sonthonax, ce blanc qui avait le premier proclamé la liberté générale dans le Nord, tandis que son collègue marchait à pas lents dans cette voie. On conçoit bien tout ce que le ressentiment personnel de Guyambois contre Polvérel dut lui suggérer en faveur de Sonthonax,