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en la lisant. Avant de parler des actes qu’elle lui suigéra, examinons ce que nous y voyons.

Savary fut le premier à signer ce document. Ce mulâtre se fît une sorte de gloire à se placer au premier rang, en tête des infâmes qui protestaient contre la liberté générale déclarée en faveur de cinq cent mille noirs !… Il ne vit plus en eux des frères auxquels il devait s’intéresser. Désormais, ses frères, ce sont les blancs auxquels il s’unissait pour rétablir l’esclavage !…

Et qu’importe que l’affranchissement général des esclaves ne fut jamais le vœu de la France, que Polvérel et Sonthonax ne reçurent jamais le pouvoir de le prononcer ? La France eut-elle jamais le droit de violer les saintes lois de la nature, qui veut que tous les hommes soient libres ? Le régime colonial n’était-il pas une longue oppression imposée par la force, par l’abus des lumières des peuples européens contre la race africaine ? Les commissaires civils n’étaient-ils pas suffisamment autorisés, par Dieu lui-même, à briser les fers des infortunés qui gémissaient sous cette oppression ? Sans ces commissaires civils, sans leur fermeté à soutenir la lutte contre les colons de toutes nuances d’opinions, l’infâme Savary eût-il pu se dire l’égal des blancs à Saint-Domingue ? Qu’importait donc à ces commissaires l’autorisation de la convention nationale, pour faire jouir les noirs des mêmes droits que leurs descendans ?

Oui, ils étaient accusés ; et par qui ? par ceux qui ne trouvèrent jamais des termes assez durs pour exprimer leur mépris pour ces descendans des noirs, des fers assez lourds pour appesantir les chaînes de ces noirs. Ils étaient décrétés d’accusation ; et par qui ? par les hommes sanguinaires qui désolaient leur propre pays par des