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avait prorogé la session législative au 10 août ; mais occupé de l’affaire des traités avec la France, il ne put entreprendre ce voyage que dans les premiers jours de juillet. Il visita d’abord l’arrondissement de Jacmel, que commandait le général Frédéric. Bien accueilli dans cette ville, dans celle d’Aquin où commandait le général Bergerac Trichet, aux Cayes, par le général Marion et la population, dans tout le Sud, enfin, Boyer se convainquit que les opposans n’avaient répandu que des bruits mensongers, comme de coutume, sur les sentimens réels des citoyens de ce département. Par rapport à la session législative, il ne séjourna que peu de temps dans chaque localité ; et bien lui valut d’avoir quitté si tôt la ville des Cayes, car, dans la nuit du 12 au 13 août, le plus terrible ouragan dont on ait gardé le souvenir se déchaîna contre cette cité qui, à cette époque, était dans toute sa splendeur. Le palais national (ancienne maison bâtie par le général Rigaud, dont les héritiers la vendirent à l’État) fut entièrement renversé : Boyer y eût probablement péri avec son état-major et une partie de sa garde. Tous les autres édifices publics et les maisons des particuliers, ou furent abîmés ou endommagés par les vents furieux ; les flots de la mer, soulevés par cette horrible tempête, envahirent la ville et montèrent à plus de cinq pieds de hauteur. Il y eut de nombreuses victimes, ainsi que dans la plaine voisine de la ville. Le Président, qui était alors à Jérémie, n’y courut pas moins de danger : sur les pressantes instances de quelques officiers de son état-major, il ne sortit du palais national, vieil édifice, que peu d’instans avant son écroulement par les efforts du vent.

Indépendamment des désastres occasionnés par ce fléau dans tout le département du Sud, des pertes que subit la