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tions à la Coupe ; il n’y eut qu’une pensée générale : c’était d’y fonder une ville pour être la capitale de la République, pour y transporter les objets précieux, les archives de l’État, les armes et autres choses du dépôt de guerre, afin de les mettre à l’abri d’un coup de main ; et c’est alors que le Président décida que cette ville porterait le nom de Pétion. Il ordonna à toutes les administrations de préparer les objets qu’elles auraient à y envoyer.

Le consul général de France fut témoin de tout cet enthousiasme. L’aménité de son caractère et sa bienveillance pour le pays lui avaient fait contracter des relations de société avec un certain nombre d’Haïtiens, dont la plupart se crurent obligés de les cesser immédiatement, pendant que ses compatriotes eux-mêmes résistaient à son injonction de quitter Haïti ; et il se trouvait ainsi dans une sorte d’isolement regrettable, par l’accomplissement de son devoir envers son gouvernement, lorsqu’il partit sur la frégate la Junon avec M. Pichon fils : ils arrivèrent en France à la fin de juillet[1].

Après leur départ, on publia, dans le Télégraphe du 19 juin, un article semi-officiel dans lequel le gouvernement fit connaître tous ses vrais motifs pour avoir refusé de ratifier les deux traités. Cet article résuma de nouveau les faits antérieurs, à partir même des premiers temps de la révolution jusqu’à l’acceptation de l’ordonnance de Charles X, en prouvant la légitimité de l’indépendance d’Haïti par celle des États-Unis, de la Colombie, du Mexique, du Chili, que la France n’avait pas hésité à reconnaître formellement ; il parla encore de la Grèce, de la Belgique et de la Pologne dont la résistance avait toutes les sympathies de cette puis-

  1. Quand Boyer vint à Paris où il mourut en 1850, M. Molien le visita et lui témoigna toute son estime : il en fut parfaitement accueilli.