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ral qui avaient par fois la teinte de ceux de l’Opposition ; mais on les attribuait à l’inspiration du général Inginac qui aurait trouvé ainsi le moyen de décrier l’administration du Président. Le fait réel est que D. Inginac partageait les idées de ses anciens condisciples, de tous les jeunes hommes de son âge, qui désiraient l’avancement, le progrès du pays en toutes choses, selon leur manière de voir[1]. Or, pour mieux exposer ces idées, il fallait raisonner sur l’économie politique, s’appuyer sur les principes de cette science : Adam Smith, J.-B. Say, Ricardo, Sismondi, etc., étaient cités souvent.

Il était impossible que, dans de telles discussions et par rapport à l’application des principes de l’économie politique en Haïti, les rédacteurs du Phare ne fournissent pas occasion de combattre, de réfuter leurs opinions. Ce fut principalement M. Fruneau qui se chargea de ce soin. Depuis peu de temps, ce jeune homme, habile à devenir citoyen d’Haïti, était arrivé de France où il avait reçu sa brillante instruction : connaissant parfaitement les mathématiques, il avait été employé aussitôt au lycée national en qualité de professeur de ces sciences, par M. Granville, directeur de cet établissement après le docteur Pescay. M. Granville était aussi un allié de la famille du Président, par son mariage avec la cousine de la femme de Boyer. Mais nous avons dit dans une note[2], que mécontent de la désapprobation qu’il avait reçue après sa mission aux États-Unis, il l’avait attribuée au général Inginac qui aurait excité le Président contre lui. Le Phare étant considéré comme l’organe de ce général, il était assez naturel que le jeune Fruneau,

  1. D. Inginac était très souvent en opposition avec son père, dans les matières de gouvernemant : plus d’une fois je les ai entendus discuter à ce sujet.
  2. Tome 9, page 303.