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Remontons à près de vingt-deux siècles en arrière, aux environs de l’an 280 avant Jésus-Christ. À cette date, l’état de l’Europe est bien différent. Alors il y a quarante-trois ans qu’Alexandre le Grand est mort, et qu’a cessé l’unité politique du vaste empire grec fondé par cet illustre conquérant. Mais une langue unique y reste maîtresse ; et le domaine géographique des langues celtiques, rejeté plus tard à l’extrême N.-O. de l’Europe, est en contact immédiat avec ce célèbre empire. La langue latine, si puissante plus tard, n’a encore acquis la suprématie que dans l’Italie du centre : Rome, longtemps en lutte avec les Gaulois, vient de remporter sur eux son premier succès décisif à la bataille de Vadimon, et colonise le territoire des Senons ; mais cela n’empêche pas les Celtes de dominer dans l’Italie du nord. La race germanique et la race slave, qu’un si brillant avenir attend, existent certainement à cette époque ; mais où précisément ? Sont-elles indépendantes ou sujettes ? Leur situation à cette date reculée est plutôt du ressort de la conjecture que de celui de l’histoire[1]. La langue dominante dans l’Europe du centre et de l’ouest est alors la langue celtique. La race celtique est alors maî-

  1. On n’est pas d’accord sur la lecture ni sur le sens du passage où Pline, XXXVII, § 35, rapporte que Pythéas, probablement au point extrême de son voyage, dans la seconde moitié du quatrième siècle av. J.-C., trouva un peuple qui paraît avoir été germain. — Voir Müllenhof, Deutsche Alterthumskunde, p. 476, 479. Cf. Zeuss, Die Deutschen und die Nachbarstämme, p. 135, 269.