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se turent et mirent la tête sous l’aile. Les bêtes qui étaient au labour s’arrêtèrent. »

La frayeur produite chez les bêtes de somme par le passage subit du jour à la nuit est constatée aussi dans le Mémoire de Louville relatif à l’éclipse de 1715. « Les chevaux, y est-il dit, qui labouraient ou marchaient sur les grandes routes, se couchèrent. Ils refusèrent d’avancer. »

Fontenelle rapporte qu’en l’année 1654, sur la simple annonce d’une éclipse totale, une multitude d’habitants de Paris allèrent se cacher au fond des caves. Grâce aux progrès des sciences, l’éclipse totale de 1842 a trouvé le public dans des dispositions bien différentes de celles qu’il manifesta pendant l’éclipse de 1654. Une vive et légitime curiosité avait remplacé des craintes puériles.

Les populations des plus pauvres villages des Pyrénées et des Alpes se transportèrent en masse sur les points culminants d’où le phénomène devait être le mieux aperçu ; elles ne doutaient pas, sauf quelques rares exceptions, que l’éclipse n’eût été exactement annoncée ; elles la rangeaient parmi les événements naturels, réguliers, calculables, dont le simple bon sens commandait de ne point s’inquiéter.

À Perpignan, les personnes gravement malades étaient seules restées dans leurs chambres. La population couvrait dès le grand matin, les terrasses, les remparts de la ville, tous les monticules extérieurs d’où l’on pouvait, espérer de voir le lever du Soleil. À la citadelle, nous avions sous les yeux, outre des groupes nombreux de citoyens établis sur les glacis, les soldats qui, dans une vaste cour, allaient être passés en revue.