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LE TONNERRE.

possibilité théorique. Eh bien, à la question de fait, la plupart des météorologistes, d’accord en cela avec le philosophe américain, ont répondu négativement. Je puis citer, par exemple, le grand nom de Saussure, Voici ce que je trouve à ce sujet dans la relation du célèbre Voyage au col du Géant :

« Quant aux orages, je n’en ai vu naître dans ces montagnes que dans le moment de la rencontre ou du conflit de deux ou plusieurs nuages. Au col du Géant, tant que nous ne voyions dans l’air ou sur la cime du Mont-Blanc, qu’un seul nuage, quelque dense et quelque obscur qu’il parût, il n’en sortait point de tonnerre ; mais s’il s’en formait deux couches l’une au-dessus de l’autre, ou s’il en montait des plaines ou des vallées qui vinssent atteindre ceux qui occupaient les cimes, leur rencontre était signalée par des coups de vent, des tonnerres, de la grêle et de la pluie. »

Il est des physiciens, et dans le nombre Saussure occupe certainement un des premiers rangs, dont les observations doivent être admises, presque sans examen, quand il s’agit de faits positifs ; mais en matière de faits négatifs, cette foi aveugle serait une grande faute. On doit comprendre, en effet, que les circonstances rares et fortuites sous lesquelles certains phénomènes naturels se développent, peuvent ne s’être jamais offertes à tel ou tel savant, quelque éminent qu’il soit d’ailleurs ; aussi, sans être découragé par l’assertion de Saussure, me suis-je mis à chercher dans de vieux recueils météorologiques qui, certes, sont loin de mériter le dédain avec lequel il est presque de bon ton d’en parler aujourd’hui, si les petits