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de la volonté de l’homme, de ses intérêts, de ses lumières et de ses passions, comme à celles de l’ordre physique ; mais il était important de le démontrer à priori, c’est ce qu’a fait M. Poisson. On jugera de la difficulté du problème par cette seule remarque : Jacques Bernoulli ne considéra qu’un cas particulier de cette question générale, et en fit cependant l’objet de ses méditations pendant vingt années consécutives. Des hommes d’ailleurs très éclairés refusent obstinément de croire à la possibilité de soumettre au calcul les questions que, à la suite de Condorcet et de Laplace, Poisson a traitées dans son grand ouvrage ; ils pensent que le mathématicien, tout habile qu’il soit, manquera toujours de données précises pour apprécier les chances d’erreur auxquelles le juré se trouve exposé dans l’appréciation de la cause qui lui est soumise ; mais ils ne réfléchissent pas que ces chances sont empruntées à l’expérience, et que leur valeur est fournie par une comparaison bien entendue du nombre moyen de votes qui ont acquitté, au nombre moyen de votes ayant prononcé la condamnation. Je reconnais toutefois que les doutes du public paraîtront légitimes, tant qu’une personne à la hauteur de cette mission n’aura pas donné un exposé simple, clair et net des principes des probabilités, en tant qu’ils sont applicables au jugement des hommes.

Il faudra, dans cet exposé, s’attacher aux résultats élémentaires, et les dégager de toutes les complications que les formules comportent ; c’est à ce prix seulement qu’on parviendra à populariser cette branche du calcul mathématique.

Laplace a trouvé que la probabilité d’être mal jugé, à