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d’exaltation ; lorsque l’inqualifiable manifeste du duc de Brunswick, eurent amené, le 10 août 1792, un sanglant combat sur la place du Carrousel, la prise du château des Tuileries et la suspension provisoire de l’autorité royale, autant dire la déchéance définitive de Louis XVI, l’Assemblée législative eut à pourvoir sans retard à la création d’un conseil exécutif. C’est le nom qu’elle donna au ministère de son choix. Roland fut placé à l’intérieur, Servan à la guerre, Clavière aux fmances, Lebrun aux affaires étrangères, Danton à la justice. On avait songé à Condorcet pour la marine, mais il ne crut pas devoir accepter. Sur sa proposition, l’Assemblée nomma Monge, qui, après quelque hésitation, se dévoua.

Je vois, dans les écrits du temps, qu’on trouva très extraordinaire qu’un savant eût refusé d’être ministre, et plus encore, qu’il se fût décidé à désigner un confrère pour occuper cette position. Je ne prendrai pas la peine de discuter sérieusement l’épigramme, même en thèse générale. J’observerai seulement que le caractère loyal et élevé de Condorcet l’avait placé toute sa vie hors des atteintes de pareils traits.

Le jour de son installation, Monge ayant remarqué dans les appartements du ministre beaucoup plus de pièces qu’il ne lui en faudrait pour ses besoins personnels et pour ceux de sa famille, songea aussitôt à loger chez lui tous les officiers de marine qui viendraient à Paris en mission. Si je ne me trompe, Monge alla au delà du projet, et les ports militaires furent officiellement informés des intentions du ministre.

La Fontaine n’aurait pas fait autrement.