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mandant supérieur alla-t-il jusqu’à s’écrier, en faisant un emprunt au cardinal Mazarin : « Il nous faut remplacer Monge par un homme qui ne soit personne ! »

Vous le voyez, la jalousie est quelquefois, à son insu, plus flatteuse, plus explicite, plus vive dans ses éloges que l’amitié elle-même.

Monge remplit l’emploi d’examinateur de la marine jusqu’au commencement de la première révolution.

Chez Monge, la douceur et l’aménité n’excluaient pas une grande fermeté. On le trouvait même inflexible toutes les fois que l’intérêt public semblait exiger qu’il fît prévaloir les décisions de l’examinateur.

« Vous avez refusé un candidat qui appartient à de bien puissantes familles, disait à notre confrère le maréchal de Castries, ministre de la marine. Votre décision me donne mille tracas ; je suis accablé de réclamations. — Vous êtes parfaitement le maître, repartit l’austère examinateur, d’admettre le candidat qui m’a paru incapable ; mais si vous prenez cette décision, monsieur le maréchal, il faudra en même temps supprimer la place que je remplis. Les fonctions d’examinateur ne seraient plus ensuite ni utiles ni acceptables. »

Le candidat inadmissible ne fut pas admis.

Monge résista aux désirs du maréchal de Castries dans une circonstance encore plus délicate peut-être.

Le ministre, plein d’estime et de bienveillance pour Monge, lui demanda, je pourrais presque dire lui enjoignit, de rédiger un cours complet de mathématiques à l’usage des aspirants et des élèves de la marine. L’ouvrage serait devenu obligatoire, et aurait été pour notre