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s’écrièrent d’une commune voix les deux amis de notre confrère. — J’ai compris à merveille, répondit Bailly avec le plus grand calme ; mais, d’une part, les deux domestiques qui m’avaient suivi à Nantes ayant entendu dire que j’allais être mis en prison, m’ont quitté ; de l’autre, si je dois être arrêté, je désire que ce soit dans une maison que j’occuperai depuis quelque temps. Je ne veux pas être qualifié dans aucun acte d’individu sans domicile ! « Qu’on dise après cela que les grands hommes ne sont pas sujets à d’étranges faiblesses !

Ces minutieux détails seront ma seule réponse à des paroles coupables que j’ai trouvées dans un ouvrage fort répandu : « M. Laplace, dit l’auteur anonyme, connaissait tous les secrets de la géométrie ; mais il n’avait pas la moindre notion de la situation de la France, et il donna à Bailly l’imprudent conseil d’aller le rejoindre. »

Ce qu’on doit déplorer ici en fait d’imprudence, c’est celle d’un écrivain qui, sans connaître exactement les faits, prononce d’autorité des sentences aussi sévères contre une des principales illustrations du pays.

Bailly ne jouit pas même de la puérile satisfaction de prendre rang au nombre des citoyens de Melun domiciliés. Le surlendemain de son arrivée dans cette ville, un soldat de l’armée révolutionnaire l’ayant reconnu, lui enjoignit brutalement de l’accompagner à la municipalité : « J’y vais, répondit froidement Bailly ; vous pouvez m’y suivre. »

Le corps municipal de Melun avait alors à sa tête un homme honnête et plein de courage, M. Tarbé des Sablons. Le vertueux magistrat essaya de prouver à la mul-