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L’illustre biographe de Chéronée déclare, il est vrai, que la présence du coq n’était pas nécessaire, que son chant produisait précisément le même effet sur le fils adoptif de Tibère. Or, le chant s’entend de fort loin ; le chant aurait donc la propriété de transporter dans l’espace et fort rapidement les émanations corporelles du roi de la basse-cour. La chose semblera peut-être difficile à croire. Moi, je trouve qu’il serait puéril de s’arrêter à une semblable difficulté : n’a-t-on pas sauté à pieds joints sur des objections bien autrement embarrassantes ?

Le maréchal d’Albret fut plus mal partagé encore que Germanicus : l’atmosphère qui le faisait tomber en syncope résidait dans la tête du marcassin. Un marcassin vivant, complet, entier, ne produisait pas d’effet ; mais en apercevant la tête de l’animal détachée du corps, le maréchal était comme frappé de la foudre. Vous le voyez, Messieurs, à quelles tristes épreuves les militaires devraient être soumis, si la théorie mesmérienne des conflits atmosphériques reprenait faveur. Il y aurait à se tenir soigneusement en garde contre un genre de ruse de guerre dont jusqu’ici personne ne s’était avisé, contre les coqs, contre les marcassins, etc., à l’aide desquels une armée pourrait être subitement privée de son chef. Il faudrait aussi éloigner du commandement « les personnages semblables à ceux qui, dit Montaigne, fuient la vue des pommes plus que les arquebusades. »

Ce n’est pas seulement entre les émanations corpusculaires des animaux vivants que les mesmériens établissaient des conflits. Ils étendaient sans hésiter leurs spéculations aux corps morts. Les anciens ont-ils rêvé que la