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dans ce désaccord une cause suffisante de rupture entre deux hommes supérieurs. La Gageure imprévue et le Philosophe sans le savoir balançaient largement le bagage, alors très-léger, de Maury. Le poëte comique atteignait déjà sa soixante-sixième année ; l’abbé était jeune. Le caractère élevé, la conduite irréprochable de Sedaine, pouvaient, sans désavantage, être mis en parallèle avec ce que le public connaissait du caractère, de la vie publique et de la vie privée du futur cardinal. Où donc l’illustre naturaliste avait-il pris des inclinations si vives pour Maury, des antipathies si ardentes pour Sedaine ? Peut-être croira-t-on que ce fut dans des préjugés nobiliaires ? Il ne serait pas, en effet, impossible que M. le comte de Buffon eût entrevu instinctivement, avec quelque répugnance, sa prochaine confraternité avec un ancien tailleur de pierres ; mais Maury n’était-il pas le fils d’un cordonnier ? Ce très-petit incident de notre histoire littéraire semblait donc devoir rester dans l’obscurité ; le hasard m’en a, je crois, donné la clef :

Vous vous rappelez, Messieurs, cet aphorisme cité sans cesse, et dont Buffon se montrait si fier :

« Le style, c’est l’homme. »

J’ai découvert que Sedaine en avait fait la contrepartie. L’auteur de Richard Cœur de Lion et du Déserteur disait, lui :

« Le style, ce n’est rien ou c’est peu de chose ! »

Placez, par la pensée, cette hérésie sous les yeux de l’immortel écrivain dont les jours et les nuits se passaient à polir son style, et si vous me demandez ensuite pour-