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changer celles de ses dispositions qui cesseraient d’être en harmonie avec l’état de la société.

Chez Condorcet, simple citoyen ou membre de nos assemblées, l’homme politique s’est réellement concentré dans ces deux idées : il est des droits naturels, des droits imprescriptibles, qu’aucune loi ne peut enfreindre sans injustice ; les Constitutions politiques doivent renfermer en elles-mêmes un moyen légal d’en réformer les abus. C’était là son Évangile. Partout où ses principes favoris sont combattus ou simplement mis en question, il accourt. Son langage alors se colore, s’anime, se passionne ; lisez, par exemple, ce passage d’une lettre que Condorcet écrivit le 30 août 1789, au moment où l’Assemblée constituante venait de repousser la proposition faite par Mathieu de Montmorency, d’aviser, à l’aide d’une disposition expresse, aux perfectionnements futurs du pacte fondamental :

« Si nos législateurs prétendent travailler pour l’éternité, il faut faire descendre la Constitution du ciel, auquel on a seul accordé jusqu’ici le droit de donner des lois immuables ; or, nous avons perdu cet art des anciens législateurs d’opérer des prodiges et de faire parler des oracles. La Pythie de Delphes et les tonnerres du Sinaï sont depuis longtemps réduits au silence. Les législateurs d’aujourd’hui ne sont que des hommes qui ne peuvent donner à des hommes, leurs égaux, que des lois passagères comme eux. »

Les premières fonctions que Condorcet ait remplies dans l’ordre politique, sont celles de membre de la municipalité de Paris. À ce titre, il fut le rédacteur de