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AMPÈRE.

rès, manient avec tant de rapidité, de précision, de sûreté. À mesure que nous avancerons dans la vie d’Ampère, cette supposition perdra graduellement de son apparente hardiesse. Maintenant, s’il me faut montrer à quel point extraordinaire l’amour du calcul s’était emparé du jeune écolier, je dirai que la tendresse maternelle l’ayant privé, pendant une grave maladie, de ses chers petits cailloux, il y suppléa avec les morceaux d’un biscuit qui lui avait été accordé après trois jours d’une diète absolue. Je n’insisterai pas davantage sur cette anecdote. Je suis loin, en effet, de la présenter comme un indice incontestable de la future vocation d’Ampère. Je sais qu’il est des enfants dont rien ne peut surmonter l’apathie, et que d’autres, au contraire, s’intéressent à tout, s’amusent de tout, même d’opérations arithmétiques sans but. Se récrie-t-on sur cette dernière circonstance ; quelqu’un s’avise-t-il de la taxer d’exagération, de placer les calculs numériques au nombre de ces choses dont le besoin, le devoir, peuvent seuls faire surmonter le dégoût ; ma réponse est toute prête : je citerai, non de simples écoliers, mais un savant distingué à qui je témoignais un jour ma surprise de le voir, en pleine séance académique, entreprendre la multiplication de deux énormes lignes de chiffres pris au hasard : « Vous oubliez, me répondit-il sur-le-champ, vous oubliez le plaisir que je trouverai tout à l’heure à faire la preuve de ce calcul par la division. »

Le jeune Ampère sut bientôt lire et dévora tous les livres qui lui tombaient sous la main. L’histoire, les voyages, la poésie, les romans, la philosophie, l’intéres-