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de notre ami, avec toutes sortes d’armes, sans en excepter celle de la plaisanterie, n’aurions-nous pas, sur d’autres points du magnétisme animal, porté notre opposition trop loin ? Un scepticisme outré était-il plus philosophique qu’une crédulité sans limites ? Par exemple, avions-nous raison de soutenir, de plein saut, qu’aucun homme n’a jamais lu, qu’aucun homme ne lira jamais, à l’aide de ses yeux, dans la complète obscurité qui règne sous une épaisseur de ving-neuf mètres de terre et de roches, je veux dire au fond des souterrains de l’Observatoire ? Était-il bien établi que les écrans opaques, c’est à-dire non perméables à la lumière, ne laissent rien passer qui puisse la suppléer et produire la vision ? Des idées systématiques nous autorisent-elles à dédaigner de recourir à l’expérience, seul juge compétent en pareille matière ? J’émets tous ces doutes comme une espèce d’amende honorable, une sorte d’expiation offerte aux mânes d’Ampère.

Pardonnez, Messieurs, cette digression, les circonstances l’avaient rendue nécessaire. Votre indulgence me sera d’autant plus précieuse, que peut-être, disons plus, que probablement j’aurai mécontenté à la fois les magnétiseurs et leurs antagonistes. Ces derniers blâment l’étendue de mes concessions, les autres, au contraire, me trouveront trop sceptique. Au surplus, de semblables reproches n’auraient rien de bien inquiétant. Le magnétisme, ne fût-ce que sur quelques points isolés, a-t-il des fondements réels ? Tout ce que ses adeptes doivent désirer, tout ce qu’ils peuvent loyalement réclamer aujourd’hui, ce sont des juges non prévenus, qui ne refusent plus de voir et d’entendre.