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commencent à ne plus se ressembler. Je me déterminerai d’autant plus volontiers a traiter cette question avec quelque développement, qu’elle se rattache aux propriétés les plus remarquables de la lumière, et que de plus il n’est pas impossible qu’elle conduise à des moyens de déterminer, dans le plus grand nombre de cas, la nature et les propriétés de ces vapeurs légères qui colorent quelques substances naturelles et sur lesquelles la chimie n’a point de prise à cause de leur excessive ténuité.

« Avant de passer à la seconde classe de phénomènes dont il doit être question dans ce Mémoire, je vais rapporter une expérience qui présente un changement brusque de couleur tout aussi extraordinaire au premier aspect que les changements dont j’ai déjà parlé, mais qui s’explique très-naturellement par une hypothèse qui, à la est en contradiction manifeste avec la douzième proposition du second livre de l’Optique de Newton.

« En parlant des couleurs qu’une mince couche de gomme laque forme sur un miroir de cuivre, j’ai déjà remarqué que, par un temps couvert et sous une inclinaison déterminée, elles étalent les mêmes dans tous les azimuts. Supposons maintenant que, l’œil restant fixe par rapport au miroir, on fasse tomber l’ombre d’un corps opaque quelconque sur sa surface et de manière que ce corps intercepte surtout les rayons lumineux qui étaient situés dans le plan d’incidence. La partie du couvercle sur laquelle tombera l’ombre changera de couleur subitement : si elle était verte d’abord, elle sera rouge maintenant, et réciproquement, si elle, était rouge à une forte lumière, elle passera au vert lorsque l’ombre du corps la couvrira. Le changement transforme, dans tous les cas, une couleur déterminée quelconque en sa complémentaire. Pour faire commodément cette expérience, il suffit de recevoir successivement sur le miroir la lumière qui passe au travers des carreaux de vitre d’une fenêtre et l’ombre des barreaux.

« En examinant les couleurs à l’aide d’un cristal de carbonate de chaux, on aperçoit, comme je l’ai déjà dit, deux images qui sont semblables ou complémentaires, suivant que les rayons réfléchis forment de grands ou de petits angles avec la surface du miroir, tandis qu’il existe une inclinaison intermédiaire pour laquelle il n’y a qu’un seul faisceau. Or, les rayons qu’on voit dans l’ombre se comportent de la même manière ; si l’on interpose le corps opaque dans le moment où le cristal de spath calcaire présente deux images semblables, elles changeront de couleur l’une et l’autre à la fois, et seront par conséquent encore semblables dans l’ombre ; si l’interposition a lieu dans ces inclinaisons où les deux images