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exaltées, il est un point sur lequel aucune dissidence d’opinion ne s’est jamais montrer : je veux parler de la force de tête, de l’intelligence incomparable du grand homme qui est mort à Sainte-Hélène : eh bien, ce grand homme, Napoléon ne savait pas le latin !

Remarquez-bien, Messieurs, que cette citation n’est pas contraire à mon système, car Napoléon avait fait des études profondes de la littérature française ; car il connaissait tous nos auteurs ; car il les admirait et les citait à propos ; car il avait passé sa vie avec Plutarque, non pas dans l’original, mais dans la traduction d’Amyot.

Sans latin et sans grec on est un médiocre écrivain. »

La France a le bonheur d’avoir en ce moment un poëte éminent ; un poëte qui offre l’union si rare d’un grand talent et du plus noble caractère ; un poëte dont l’imprimerie a vainement essayé de reproduite les œuvres au gré de l’impatience publique ; un poëte enfin dont tout le monde sait les vers par cœur (prenez garde, Messieurs, ce n’est pas M. de Lamartine que j’entends signaler ; si je n’en avertissais pas, la méprise serait naturelle) ; je parle de Béranger, du chansonnier que le public a salué du nom si flatteur et si juste de poëte national. Eh bien, Béranger ne sait pas le latin, Je ne commets pas une indiscrétion, car le poëte le dit à qui veut l’entendre.

Dans le siècle de Louis XIV, je pourrais citer, je crois, comme s’étant trouvés dans le même cas, Vauvenargues et Quinault ?

Les pays étrangers eux-mêmes ne me laisseraient pas désarmé. Shakespeare, le plus grand poëte de l’Angleterre par la hardiesse, la profondeur, la naïveté de ses