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sur-le-champ nos préparatifs de départ, et, le 28 novembre 1808, nous mîmes à la voile le cap sur Marseille. Mais il était écrit là-haut, comme disaient les Musulmans à bord du navire, que nous n’entrerions pas dans cette ville. Nous apercevions déjà les bâtisses blanches qui couronnent les collines voisines de Marseille, lorsqu’un coup de mistral d’une violence extrême nous poussa du nord au sud.

Je ne sais quelle route nous suivîmes, car j’étais couché dans la chambre, abîmé par le mal de mer ; je puis donc, quoique astronome, avouer sans honte qu’au moment où nos inhabiles pilotes se prétendaient par le travers des Baléares, nous abordions, le 5 décembre, à Bougie.

Là on prétendit que pendant les trois mois d’hivernage toute communication avec Alger, par les petites barques nommées sandales, serait impossible, et je me résignai à la pénible perspective d’un si long séjour dans un lieu alors presque désert. Un soir, je promenais mes tristes réflexions sur le pont du navire, lorsqu’un coup de fusil parti de la côte vint frapper le bordage à côté duquel je passais. Ceci me suggéra la pensée de me rendre à Alger par terre.

J’allai le lendemain, accompagné de M. Berthemie et du capitaine Spiro Calligero, chez le caïd de la ville : « Je veux, lui dis-je, me rendre à Alger par terre. » Cet homme, tout effrayé, s’écria : « Je ne puis vous le permettre ; vous seriez certainement tué en route ; votre consul porterait plainte au dey, et je serais décapité.