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quelque crime, je lui donnai une drogue ; mais, voulant prendre mes précautions, en cas qu’on fît quelques recherches sur cette affaire, je ne voulus pas d’abord prendre l’argent qu’il m’offroit, et je lui dis : mon ami, de peur que, parmi ces pièces d’or que tu me présentes, il n’y en ait quelqu’une de fausse ou d’altérée, remets-les dans ce même sac, et les cachetes avec ton anneau, jusqu’à demain, que nous les ferons examiner par un changeur. Il me crut, il cacheta l’argent, et si-tôt que j’ai vu ce malheureux paroître devant vous, j’ai donné ordre à un de mes gens d’aller au plus vîte prendre cet argent chez moi, et de me l’apporter. Le voici que je vous présente, qu’il le regarde, et qu’il reconnoisse son cachet. Or, comment peut-on accuser ce jeune homme-ci d’avoir donné à son frère un poison, que cet esclave a acheté lui-même. Dans le moment ce scélérat fut atteint d’une frayeur terrible ; un frisson le saisit, et il devint pâle comme la mort. Il commença à remuer tantôt un pied, tantôt l’autre, et à se gratter la tête, proférant entre ses dents quelques mauvais discours, de manière qu’il n’y avoit personne, à le voir ainsi, qui ne jugeât bien qu’il n’étoit pas tout-à-fait innocent. Mais, après qu’il se fut un peu remis, il ne cessa point de nier avec opiniâtreté tout ce que le médecin avoit dit, et de l’accuser de mensonge.

Le vieillard voyant sa probité attaquée devant