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pliquent beaucoup de traits de mon caractère et certains actes de ma vie. D’une famille jadis nombreuse, je suis le seul survivant. « Maintenant je ne prie que pour ta santé, me disait un jour Palaguéïa — et quand je me rappelle tous les autres, il me faut dire : Dieu, garde l’âme de ton serf ! »

Hier, j’ai trouvé ce cahier et j’ai relu mon journal. Chose étrange, les lettres que j’ai écrites il y a trente ans sont beaucoup plus près de mon âme que ce journal commencé l’année dernière.

Une transformation morale s’est produite en moi depuis ces deux mois. Par exemple, en commençant ce journal, je me suis demandé : « Suis-je heureux ou malheureux ? » et je ne pouvais répondre à cette question. Aujourd’hui, j’y réponds sans hésiter : j’ai été malheureux pendant de longues années, mais maintenant je suis tout à fait heureux. Peut-être mes dissertations sur l’amour de l’humanité étaient-elles logiques, mais ce qui est logique n’est pas toujours juste. Je ne puis dire notamment si j’aime l’humanité ou la planète ou le système solaire : je sais une seule chose, que j’aime la vie dans toutes ses créations, j’aime la pensée que je vis.

Aujourd’hui, il fait très chaud, comme il