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— Maria Pétrovna, est-ce vous ? demandai-je en me frottant les yeux.

— Non, je ne suis pas Maria Pétrovna, me répondit en s’approchant de mon lit une petite femme maigre au doux et sympathique visage. Je suis la garde-malade, vous m’appelez toujours Maria Pétrovna, mais cela ne fait rien…

— Et quel est votre nom ?

— Je vous le dirai plus tard. À présent, il ne faut plus parler, prenez votre potion et dormez.

En même temps la petite femme enlevait très adroitement mon oreiller et m’en remettait un autre. Jusqu’à présent je me rappelle comme je m’endormis doucement la tête appuyée sur ce coussin. De ce jour commença la guérison. Dans les rares instants où, durant ma maladie, j’avais pu penser, je me rendais bien compte que j’allais mourir, et cette pensée ne m’attristait guère ; chaque nouvelle phase de ma guérison, au contraire, remplissait mon cœur d’une joie indicible. Mon premier entretien avec Anna Dmitrievna, — c’était le nom de la garde, — la première tasse de thé qu’on me permit, la première bouffée d’air frais de printemps quand on ouvrit ma fenêtre, tout cela fut pour moi autant de fêtes.

Parmi les lettres restées fermées que je trouvai sur mon bureau, il y en avait une