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chaque âme humaine, se cache la pensée que notre existence ne peut cesser. C’est une voix intérieure, timide, faible ; on peut la dominer facilement par le raisonnement, mais on ne peut l’étouffer ; parfois elle se hausse et les hommes lui obéissent inconsciemment, presque contre leur volonté. Pourquoi allons-nous aux enterrements et aux messes mortuaires ? Je ne parle pas des enterrements mondains où l’on va pour les parents du défunt et quelquefois pour se distraire. Un jour, Maria Pétrovna s’attristait de n’avoir pas su à temps la mort d’une de ses amies et de n’avoir pu assister à la messe. Pour la consoler, je lui dis qu’elle irait aussi bien à la messe un autre jour. « Oh ! ce n’est pas la même chose, me répondit-elle naïvement ; c’est à la première messe qu’il y a toujours le plus de monde. » Mais il est arrivé à chacun de nous d’aller aux messes d’un célibataire sans parents et où nous ne pouvions espérer rencontrer personne. J’ai toujours fait mon possible pour assister à des messes de ce genre, me disant que j’étais obligé de payer une dernière dette… à qui ? Payer une dernière dette au défunt, cela n’a pas de sens, puisqu’il ne vous verra pas. Mais une voix intérieure me disait que le défunt ver-