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À SA MARRAINE

Mon imagination va peut-être vite en effet et je vous remercie de m’avoir prévenu. Toutefois il est peut-être injuste de reprocher une imprudence à un soldat.

D’autre part la mention que vous faites « d’un affreux laideron » me garantit qu’il ne s’agit point de vous. Les « affreux laiderons » ne sont pas au demeurant toujours désagréables et il en est de bien agaçants. En effet, Léonard à qui je n’ai rien demandé ne m’a aucunement renseigné.

Mais je vous remercie, madame et nouvelle amie, de n’avoir point tardé à me répondre.

Je ne vous disputerai point sur Tristan. D’ailleurs la vie des camps m’a fait oublier un grand nombre des choses qui concernent les lettres.

Le talisman a désormais plus de vertu puisqu’à l’ardeur qui lui était propre vous joignez celle de l’amitié. Je vous envoie aujourd’hui un petit poème. Ce prélude de notre amitié poétique vous montrera combien je pense à vous.

Néanmoins notre intimité est encore trop incertaine pour que j’aie trouvé le ton. Il viendra peu à peu.