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veille. Comme il étoit toujours amoureux de la princesse, il se faisoit conduire chez elle, & la faisoit danser en lui jouant toutes sortes d’airs, ce qui la réjouissoit si fort, qu’elle faisoit au prince mille amitiés.

La gouvernante, qui est entièrement dans vos intérêts, appréhenda cette nouvelle passion ; elle n’osoit la combattre ouvertement, parce qu’elle savoit qu’il entre beaucoup de contradiction dans les désirs des filles. Voici le moyen qu’elle trouva pour empêcher le progrès de cette inclination dangereuse. Un jour que Solocule venoit, à son ordinaire, rendre visite à la princesse, elle lui dit que Fêlée seroit charmée s’il lui jouoit quelques concerto. Le prince en joua deux ou trois. La princesse n’osoit pas lui dire de cesser, de peur de manquer à la politesse ; elle bâilloit sans que le prince s’en aperçut ; elle frappoit du pied d’impatience, il croyoit qu’elle battoit la mesure ; enfin elle s’évanouit tout à fait, & depuis ce temps là elle n’a plus voulu entendre parler de la vielle, ni de celui qui en jouoit.

Solocule s’en est consolé, en disant qu’elle étoit de mauvais goût de ne pas aimer le concerto sur un instrument si plein d’harmonie, & s’est retiré dans un château de la princesse sa