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son père en ce temps-là ; &, ce qui peut-être l’affligea plus que sa perte, la dame fut obligée d’aller à Venise en diligence solliciter un procès, où il s’agissoit pour ses enfans de la plus grande partie de leur bien. Il lui proposa de l’épouser avant son départ, mais elle crut qu’un mariage si précipité, dans un temps de deuil, feroit trop parler le monde ; & le délai qu’elle demanda mit le cavalier dans un déplaisir inconcevable. Les affaires qu’il avoit de son côté ne lui permettant pas de l’accompagner, il la pria mille fois de ne le pas oublier dans un lieu où il prevoyoit que son mérite lui attireroit d’illustres hommages. Elle l’assura qu’il lui faisoit tort de lui demander de la confiance, puisqu’un cœur comme le sien étoit incapable de changer de sentimens. Ils s’écrivirent souvent, & elle auroit pu remplir ses lettres des conquêtes qu’elle dédaigna pour lui, si elle eût pu se faire une gloire de ces sortes de triomphes ; mais elle ne voulut devoir sa tendresse qu’à son seul penchant, & elle eût été fâchée qu’aucun motif de reconnaissance l’eût portée à soutenir une passion qu’il lui avoit tant de fois juré ne devoir finir qu’avec sa vie.

Cependant elle rejeta divers partis fort considérables, qui l’emportoient sur le cavalier. Il est vrai que, loin d’ôter l’espérance à un