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ayant servi à les convaincre l’un l’autre d’un véritable mérite, la belle veuve ne put refuser son estime au cavalier, & le cavalier se fit une gloire d’être des amis de la belle veuve. Comme ils vivoient sans inquiétude, ils n’approfondirent rien par-delà ces sentimens ; chacun d’eux les prit pour ce qu’il vouloit qu’ils fussent ; & ils seroient demeurés encore long-temps dans l’erreur qui leur faisoit croire que ce n’étoit que de l’amitié & de l’estime, si le cavalier n’eût pas été obligé de faire un voyage de deux mois. L’absence leva le voile qui leur cachoit ce qu’ils s’étoient déguisé. Huit jours furent à peine écoulés, qu’ils reconnurent tous deux qu’il leur manquoit quelque chose pour être contens. La dame fut effrayée de ce qu’elle découvrit en s’examinant ; & ce qui fit son plus grand chagrin, c’est qu’elle craignit d’avoir fait un pas que le cavalier n’eût point fait de son côté. Il lui écrivit trois ou quatre fois, & il lui parut si réservé dans ses lettres, qu’elle fut persuadée qu’il étoit tranquille, tandis qu’elle souffroit de ne le plus voir. Elle en jugea fort injustement ; il souffroit encore plus qu’elle, & n’avoit que trop connu qu’il l’aimoit d’amour ; mais le respect l’empêchoit d’expliquer ses sentimens, & il lui sembloit que le papier feroit mal connoître ce qu’il falloit que ses actions mar-