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la belle dépendoit d’un père avare, qui, quoique très-riche, ne lui feroit pas de grands avantages, & que lorsqu’il seroit mort, deux fils qu’il avoit partageroient sa succession, sans qu’elle y eût presque aucune part, toutes ses terres étant situées dans des provinces où la coutume étoit fort contraire aux filles. Cet avis ne put rien sur l’esprit de Polaure. Il pria la dame de lui procurer la vue de Banane, afin que la connoissant parfaitement, il pût juger s’ils étoient nés l’un pour l’autre. La dame eut la complaisance qu’il lui demandoit. Elle servoit une amie qui méritoit bien qu’on l’obligeât ; & après l’avis donné sur l’avarice du père, elle n’avoit rien à se reprocher. Les entrevues se firent d’abord sans marquer aucun dessein. On se borna à d’agréables conversations, & Polaure fut payé des soins qu’il prenoit de chercher à plaire, par tout ce que la bienséance souffroit qu’on lui montrât de reconnoissance. Il demeura bientôt convaincu de tout le mérite qu’il avoit cru reconnoître dans Banane ; & s’appliquant à étudier ses plus secrets sentimens, il n’eut pas de peine à découvrir qu’ils lui étoient favorables.

La mère, qui avoit vu naître cette passion avec plaisir, entra avec une joie extrême dans les mesures qui étoient à prendre pour enga-