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mettre aussi la main au sac ; il se mit à ronger sa corde pour se mettre en liberté d’exécuter son dessein, & en vint à bout ; il se jette sur le coffre, prend le sac, l’ouvre ; & comme le matelot s’en aperçut, & qu’il vouloit accourir pour le lui ôter, le singe s’enfuit : le matelot court après ; mais l’animal, plus léger, gagne le haut banc, & se va percher sur le bout d’une vergue qui avançoit bien loin dans la mer. Le bon homme, tremblant pour sa bourse, n’osoit effrayer le singe, de crainte qu’il ne la laissât tomber dans l’eau. Il fallut donc le laisser faire. Le singe, à loisir & en toute liberté, tenant d’une main le sac, tiroit avec l’autre une pièce d’argent, la portoit devant ses yeux, puis vers son oreille, & enfin au bout de la langue, pour la goûter ; & après l’avoir bien tournée & retournée, il la faisoit sonner sur le bout de la vergue, d’où elle tomboit dans la mer. Le jeu lui plut ; il reprit une seconde pièce & une troisième, & continua le même manège jusqu’à la dernière, pendant que son maître se désespéroit ; après quoi il referma le sac comme il avoit vu faire, & le rapporta dans le coffre, en criant de toutes ses forces pour les coups qu’il pressentoit déjà ; car cet animal voit fort bien quand il a manqué ; mais il est indisciplinable