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sible à un homme de manger en un jour un magasin de sel, que cependant il n’avoit jamais trouvé personne qui osât l’entreprendre. Comme je sais que vous avez autant d’esprit que de prudence, je vous prie de m’en faire voir la possibilité ; car je ne saurois m’imaginer qu’un homme puisse manger en si peu de temps un magasin de sel. La chose, madame, répondit le puiné de ces princes, n’est pas difficile à croire, & j’offre de le faire toutes les fois qu’il plaira à votre majesté.

La reine, surprise de cette réponse, voulut le lendemain qu’il en fit l’épreuve. Le jour venu, il l’alla trouver, & lui dit : Je viens, madame, pour exécuter vos ordres. En achevant ces mots, il tira de sa poche une petite boule d’or de la grosseur d’un pois, pleine de sel, & l’ayant ouverte, il mangea tout ce qui y étoit. La reine se mit à rire de cette épreuve, & dit, que ce n’étoit pas ainsi qu’elle l’entendoit, que c’étoit d’un de ses magasins à sel, dont elle vouloit parler. Le jeune prince, sans s’étonner, répondit que cela n’étoit pas plus difficile que ce qu’il venoit de faire, & demanda à aller à ce magasin. La reine y consentit, & ce prince y étant entré avec plusieurs personnes qui devoient être témoins de ce qu’il feroit, il mouilla