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que je ne serois point malheureux. Quand nous fumes arrivés, il me conduisit à son habitation, que je trouvai des plus riches. Il avoit une femme âgée d’environ quarante ans, qui paroissoit douce & bonne maîtresse. On me donna pour occupation le soin de labourer le jardin & de cultiver les fleurs. Je passois des jours tranquilles, & mon bonheur auroit duré longtemps, st l’amour ne fût venu le traverser.

Notre patrone avoit une jeune esclave de même pays que moi, & qu’elle chérissoit extrêmement. Cette jeune moresse s’appeloit Zaïde. (Prenany fit répéter ce nom à l’esclave, qui lui demanda avec vivacité s’il avoit connu cette malheureuse fille ; car, ajouta l’esclave, sans doute elle ne vit plus, & je l’ai perdue pour jamais. Prenany, curieux d’entendre le reste de l’histoire de l’esclave, ne voulut point lui dire qu’il connoissoit une jeune personne de ce nom, & le pria d’achever.)

Zaïde, continua l’esclave, conçut pour moi l’amitié la plus tendre. Les sentimens de cette aimable fille étoient bien au dessus de son état & de sa naissance ; rien n’égaloit sa douceur & sa générosité : son défaut étoit trop de délicatesse dans son amour ; elle en troubloit quelquefois les douceurs par ses soupçons & par sa ja-